Quelle est la genèse du Dictionnaire amoureux des îles ?
La genèse, c’était tout d’abord une évidence. J’ai eu la chance de naître dans un pays où la marée est terriblement active, ce qui du point de vue du paysage nous apprend une chose essentielle : la première, c’est que la mer fait la terre et pas le contraire. La deuxième, c’est que les îles ne sont pas un ornement ou un complément du rivage, ce ne sont pas des navires à l’ancre.
Il y a un tas d’autres choses qui m‘intéressent sur le monde des îles, mais pour commencer c’est ça sans doute qui m’a frappé le plus.
Et puis, il y a tous les imaginaires des îles. Les îles paradisiaques, mais aussi les îles bagnes, les îles de la traite, les îles de la déportation. Ce qui fait qu’à travers les îles, on visite finalement le plus de l’humanité. Du côté du rêve et aussi du côté de l’enfer. Et j’ai aimé tout ça. Dans mon dictionnaire amoureux, je prends tout : l’Éden et l’Enfer.
Quelle place ont les îles du Ponant dans votre ouvrage et dans votre vie ?
Les îles du Ponant sont mes îles chéries. La vie sur les îles finistériennes est toujours plus dure. Je sais que les Sénans disent souvent, quand la mer est trop forte pour que le bateau qui ravitaille l’île puisse passer : « Ah, le continent est isolé. » Et c’est ce que dit profondément l’expérience îlienne : l’île, c’est à la fois quelque chose de compliqué mais aussi un refuge ; un espace qui est tout, dans le sens où on est solidaire, même si on ne s’aime pas.
Je pense que les îles du Ponant sont passionnantes car ce sont des avant-postes. Françoise Péron écrivait Ouessant, l'île sentinelle. J’ai envie de dire que toutes les îles le sont.
Que nous apprennent les îles ?
Elles nous apprennent non seulement que la mer est en mouvement, qu’elle dessine les côtes et qu’elle les fait. Mais aussi que finalement, c’est la mer qui gagnera. Tous les îliens savent que la mer est fragile. Ils savent que cette mer qui les entoure, un jour ou l’autre, aura le dernier mot. Les îles nous disent la vérité du monde. La vérité géographique du monde.
Elles nous disent une vérité des éléments, des femmes et des hommes aussi. De leur capacité à s’adapter à des situations qui sont plus dures, plus difficiles, mais peut-être aussi plus belles qu’ailleurs.
Pour moi, les îles ne sont pas des cartes postales ou du folklore, mais c’est l’avenir. Elles ont beaucoup à nous apprendre.